mercredi 3 novembre 2021

Laelith, la ville mystique pour jeu de rôle

Laelith, la ville imaginaire pour le jeu de rôle des Messagers galactiques
Laelith est une cité imaginaire pour jeu de rôle sortie pour la première fois dans la revue Casus Belli N° 35 de 1986. Là non plus, nous n'allons pas refaire l'historique du truc ni sa description ostentatoire disponible par ailleurs sur Internet voire en pdf. Juste essayer de comprendre pourquoi ce concept – ce support ludique et imaginaire – a pu si bien traverser les âges pour partager à plusieurs un univers onirique commun.

Une ville imaginaire pour jeu de rôle, Laelith

Tout d'abord, la ville est ouverte à tout un chacun quelque soit sa race, son origine, ou sa culture… Mieux, son spectacle – paysage – grandiose suscite la foi du croyant voire lui fait ressentir un brutal accès de mysticisme… Aberration ou merveille ? Nous ne nous attarderons pas sur « l'œcuménisme » du culte des temples des 4 éléments – censés absorber toute forme religieuse – et, en son centre, la figure lumineuse du Roi-Dieu qui peut même se doubler de celle, plus souterraine, d'un Empereur-Démon (très Gurps Goblins, Bal des vampires)… Certes ce fond mystique participe aussi au charme de la cité mais concentrons nous plutôt sur les formes concrètes de ses quartiers et paysages.
La qualité indéniable de Laelith vient de son agencement « façon puzzle », à la fois précis mais pas maniaque du détail, pour laisser à chacun une possibilité créative et imaginative tout en participant à un univers commun. Ça a l'air « naturel » mais un tel concept relève pour le moins d'un tour de force créatif… C'est ce qui fait le succès de Laelith.
- Le premier puzzle est celui d'un plateau incliné où s'élèvent les 6 quartiers de la ville et sous lequel se dissimule le 7e secteur du Cloaque. Le plateau est partagé par une faille où s'engouffre l'Inlam, le torrent du gigantesque lac d'Altalith qui nourrit la ville.
- Le 2e puzzle est celui du « hors ville » avec les sites proches de Laelith.
- Le 3e puzzle concerne les 6 provinces qui entourent le haut lac d'Altalith.

Laelith, différentes versions, un seul concept :

Chacune des parties du grand ensemble de l'univers Laelith est décrite dans les différentes versions de la cité mystique avec force personnages, organisations et débuts d'interactions possibles sans parler de la flopée de scénarios… J'attire l'attention du nouveau meneur de jeu/MJ potentiel qui s'attelle au « pavé Laelith » ; vouloir « conter » cet univers, parce qu'on a digéré son ensemble, peut nuire à la fluidité du scénario surtout si on le joue façon pulp… Mieux vaut, à mon avis, décrire l'ensemble un minimum pour se concentrer sur l'ambiance propre à un quartier/organisation qui « tient » le scénario quitte à jouer une mini-campagne pour mieux découvrir la ville par étapes…

De Casus Belli à Black Book edition

 
L'autre originalité de Laelith est sa rupture volontaire par rapport aux villes médiévales imaginaires si ce n'est « nordiques »… Certes l'amateur de nain pourra s'égarer du côté des falaises de Vorn, et le barbare tatoué de runes en Agramor, mais l'identité de la ville n'est pas là. On nous parle de Byzance comme inspiration possible, voire de Constantine en Algérie. Se souvenir qu'à côté de Légendes celtiques, Jeux Descartes nous proposait aussi de jouer les Contes des mille et une nuits… La ville jdr a ce « charme antique » que les amateurs de jeu de figurines historiques ne démentiront pas. Coup de chapeau d'ailleurs au diorama « l'Impasse de l'Arbre de Tulé », de Jean-Marie Noël, dans la dernière édition, et son ambiance très « Gangs of Rome ».
En se situant volontairement dans un contexte « montagnard et méditerranéen », Laelith se distingue des cadres rôlistiques habituels ; nous verrons que de telles inspirations peuvent avoir leurs sources dans des contrées pas si éloignées de nous… Le hors ville est aussi celui des « steppes » et l'ookabh n'est pas sans rappeler le yack ou le bœuf musqué avec tribus nomades « caucasiennes »…
Enfin, il est à noter la création originale de personnages comme les Utruz – des Hommes-poissons – et les étranges Chupl'z, Huvaliniens, Zadulhiens, qui fleurent bon la rencontre extra-terrestre avec les Messagers galactiques… Comprendre que, dès le départ, Laelith dépasse les frontières de cet univers à priori médiéval fantastique ; les révélations sur les mystérieux Litos nous disent que des « civilisations spatiales » ne sont peut-être pas très loin… Il est bien précisé que la ville peut se jouer aussi avec Mega, Empire galactique ou tout autre jeu de science-fiction… La question est de savoir à quel degré on y jouera la « technologie avancée » et l'on pense immédiatement aux « artifices camouflés » des Mégas ou à la fameuse prime directive de Star-Trek.

La ville de jdr Laelith idéale, la tienne ou la mienne ?  

Pour ma part, j'ose créer une Laelith où la technologie est présente… Une ville d'aspect médiéval mais avec des objets, armes et véhicules de toutes les époques rôlistes : armes à poudre type Warhammer, machines à vapeur steam-punk, railway-train old-west... Ganymédien contemporain avec clope et costume clair de prof de gauche, space-marine sur les remparts… Felouque et aéroglisseur anti-grav amarrés ensemble à la Chaussée du Lac… Nous reparlerons de cette Laelith qui pourrait surgir dans le background des grandes sagas Dune et Starwars… qui pourrait rappeler les ambiances d'Arzak l'Arpenteur de Moebius ou Burton & Cyb… Une ville propice au « recyclage » de toute forme de maquettes et figurines tant les scénarios d'escarmouches s'y prêtent.
Les environs de Laelith

- L'ajout d'un 4e Puzzle plus vaste, du Désert des Marches du Couchant jusqu'à l'immense Plaine des Oliviers, permettrait en outre d'associer durablement à Laelith les mondes de Goferfinker, Jarandell, voire un astro-port (ou plutôt un « lodge » selon la dernière nomenclature Mega 5 …). Est-ce trahir l'esprit du jeu ? Là est la question…
Les nombreux « déboîtages » de la dernière version de Laelith font souvent le même constat ; malgré le respect de l'univers med-fan, les illustrations plutôt « dark » coïncident mal avec l'aspect originel « lumineux et léger » de la cité. Après lecture de la dernière mouture, je peux dire que ces illustrations sont en accord avec la nouvelle ambiance que cette édition souhaite créer... On nous propose aussi une version de Laelith pour Cthulu. Nous pourrions peut-être faire la même remarque à propos de Mega 5e Paradigme. Si ces choix éditoriaux sont dus à des tendances du moment, auront-ils autant de succès dans le temps que les versions précédentes malgré la qualité indéniable du fini des produits ? Finalement, à chacun de peaufiner SA Laelith ; la mienne est en cinémascope colorisé tendance Ali Baba et les 40 Voleurs de l'Espace, tendance Satyricon de Fellini ou Médée de Pasolini revisitée par Jodorowsky et Miyazaki. Et la tienne ?